Gianni le magnifique, Stéphanie des Horts
- Genovefa
- 17 juin
- 3 min de lecture

En ce jour de juin 1919, Giovanni Agnelli, le fondateur de l’empire Fiat, est déçu : comment son fils Edoardo peut-il épouser cette extravagante Virginia Bourbon del Monte, une jeune femme ravissante, certes, mais qui n’a pas fait d’études et n’a aucune éducation ? Sa décision est prise, il ne sera pas son héritier, il n’en a pas la trempe.
Installé à Turin, le jeune couple qui mène une vie effrénée de mondanités a sept enfants dont le second, Gianni, né en 1921, est un garçon turbulent, insolent et rétif à toute discipline. Il faut dire que « l’éducation n’est pas le fort de ses parents, trop occupés à s’aimer et à aimer ailleurs, ils sont si libres ». Et puis, les projets de Gianni Agnelli sont simples : s’amuser et ne jamais travailler.
Pourtant, c’est lui que son grand-père, dit « le Senatore » (un titre conféré par Mussolini en 1923), a désigné pour lui succéder à la tête de son entreprise familiale. Edoardo, pour sa part, a créé son propre domaine : la station de ski ultramoderne de Sestrières qui attire les aristocrates et milliardaires de toute l’Europe.
Le 14 juillet 1935, le clan Agnelli est confronté à un premier drame : projeté dans l’eau au moment où il sortait du cockpit d’un hydravion, Edoardo est décapité par l’hélice. Agé de quatorze ans, Gianni endosse désormais le rôle de chef de famille et d’héritier de l’empire Fiat.
Quand la guerre éclate, Gianni s’engage sous les couleurs italiennes, fascistes donc, et est envoyé sur le front de l’Est, puis en Afrique du Nord où il est blessé. Mais c’est auprès des Alliés qu’il fête la victoire. Contre toute attente, il obtient son diplôme de droit à l’université de Turin, qui lui vaudra le surnom d’Avvocato, même s’il n’a jamais exercé ce métier.
Le 30 novembre 1945, sa vie bascule. Sa mère, « son amour le plus pur, l’unique femme de sa vie » meurt dans un accident de voiture. Dévasté, détruit, Gianni ne s’en remettra jamais. « Après elle, toutes les femmes de sa vie seront bafouées. Il n’essaiera même pas de les aimer (…) il se contentera de les mépriser. Puis de les piétiner. Avant de les oublier », écrit l’auteure.
Et des femmes, il y en a eu ! Sur la Riviera, avec ses amis, beaux, riches et frivoles comme lui, parmi lesquels figurent Ali Khan et Errol Flynn, Gianni Agnelli, incorrigible, multiplie les conquêtes. Princesses, actrices, mondaines ou putains, elles sont toutes folles de ce play-boy irrésistible qui se baigne nu. Sa vie tourne exclusivement autour d’elles, du champagne et de la cocaïne.
Mais lorsqu’il s’affiche un peu trop avec Pamela Churchill, courtisane de haute volée qui s’est mise en tête de l’épouser – et, pour ce faire, accepte toutes ses infidélités -, la famille Agnelli s’affole et s’empresse de lui présenter la princesse florentine Marella Caracciolo di Castagneto.
Deux enfants naissent de leur union mais Gianni, qui dévale les pentes de Saint-Moritz, défie les vagues à la barre de son hors-bord et dévore l’asphalte au volant de ses bolides – il a échappé à la mort à plusieurs reprises -, n’est jamais là, et l’aristocrate se meurt d’ennui. Et de désespoir, lorsqu’elle découvre que son mari entretient une liaison avec sa meilleure amie, qu’il ne quitte pas Anita Ekberg d’une semelle sur les plateaux de tournage et qu’il se promène main dans la main avec Jackie Kennedy.
Et la Fiat dans tout ça ?
A 45 ans, rongé par la culpabilité d’avoir fui ses responsabilités pendant tant d’années, Gianni accepte, enfin, de prendre les rênes de l’empire. Et l’héritier fera de Fiat non seulement la plus grand entreprise italienne mais l’un des principaux constructeurs d’automobiles d’Europe.
Dans cette biographie extrêmement documentée, qui fourmille d’anecdotes inédites parfois très drôles, Stéphanie des Horts ressuscite le destin exceptionnel de Gianni Agnelli qui, écrasé par les attentes de son grand-père qui l’a désigné, très jeune, comme héritier de l’empire Fiat, a vécu des années de frivolité, parce qu’il était vraiment magnifique, avant de devenir l’un des plus grands dirigeants d’entreprises du monde.
Editions Albin Michel, 2025
A propos de l’auteure
Titulaire d’une maitrise de littérature anglaise et critique littéraire, Stéphanie des Horts est l’auteure de nombreuses biographies dont notamment « Le secret de Rita H. », « Pamela », «Les sœurs Livanos », « Jackie et Lee », «Les heureux du monde » ou encore « Cynthia ».
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